Hincapie, le troisième homme
Odilon Kossounou parti à Bergame, le défenseur équatorien étoffe petit à petit son jeu et ses responsabilités aux côtés de Jonathan Tah et Edmond Tapsoba au sein du triptyque défensif du Bayer Leverkusen. Non sans avoir, encore, une marge de progression.
Il n'a que 22 ans et n'en ressemble pas moins, déjà, à un taulier. Une précocité dont il est le premier étonné. Mais son histoire de footballeur accompli, de fait, s'étend sur plus d'une décennie. Sur la côte ouest de l'Equateur, son pays, le jeune adolescent d'alors collectionnait déjà les trophées. À 10 ans, avec la bénédiction de son père, il allait quitter la maison pour réaliser ses rêves et éponger son trop-plein de talent à Guayaquil, à 460 km de là. "Tout, dans ma vie, se passe à grande vitesse", déclarait-il il y a peu à la chaîne télé du Bayer Leverkusen. "Je n'aurais jamais imaginé il y a quatre ans que j'en serais là aujourd'hui. Je suis fier, parce que je me suis donné beaucoup de mal."
Ce constat ne le pousse en rien à se reposer sur ses lauriers. "Il y a plus encore à accomplir", assène-t-il. On l'imagine, à moyen terme, dans un club de plus grande envergure que le champion d'Allemagne en titre mais, pour l'instant, il s'y affirme de plus en plus et ce n'est déjà pas mal. Dès 2022, alors qu'il n'a que 20 ans, ses qualités de décontraction et de dureté au duel avaient tapé dans l'oeil d'un certain Diego Simeone à l'occasion d'une confrontation Bayer-Atletico (2-0) où il s'était montré à son aise. Le club madrilène s'intéresse toujours à lui, comme Liverpool, Chelsea, West Ham ou Tottenham. Liste non exhaustive. Son contrat sur les bords du Rhin s'étend jusqu'en 2027 mais, la saison prochaine, il aura le choix...
Progression constante...
Arrivé à 19 ans, mi-août 2021, du CA Talleres, club de première division argentine, pour environ 6,35 millions de francs, Hincapie progresse régulièrement depuis. Mais déjà, ses qualités frappaient les esprits. "Son jeu est sûr, maîtrisé, clair", louait alors son directeur sportif Simon Rolfes. Dès sa première titularisation, en Europe League, contre le Celtic (4-0), il inscrivait un but. Mais ce flair offensif est un bonus : sa plus grosse qualité, c'est son assurance défensive, polie à la dure école d'Independiente del Valle. "Si tu n'apprenait pas correctement, là-bas, tu ne jouais pas le week-end", raconte-t-il. "Voire tu étais privé d'entraînement la semaine suivante. C'était dur. Mais c'est la vie : réussir nécessite de l'engagement, de la dévotion."
À Leverkusen, il y a longtemps que Xabi Alonso lui confie volontiers des responsabilités. "C'est ce qu'il exige, indépendamment de votre âge", a constaté Hincapie. Pourtant, il y a un peu plus d'un an, le jeune défenseur international avait subi un coup d'arrêt, blessé au pied. Il lui avait fallu ensuite la moitié de la saison pour s'installer comme joueur régulier dans le onze du Basque. La Coupe d'Afrique des Nations, qui avait happé Kossounou et Tapsoba pendant l'hiver, l'y avait aidé sans doute, mais il y serait parvenu de lui-même en raison de sa polyvalence (arrière central, arrière gauche, milieu gauche).
... valeur marchande aussi
Piero Hincapie, seul gaucher parmi les arrières centraux du Bayer, n'a pas réellement de point faible. Ne rend jamais de copie médiocre. N'est pas immense (1,84 m) mais affiche un jeu de tête efficace. Fait partie des dix défenseurs axiaux les plus rapides de Bundesliga. Fait preuve de grinta dans les duels et ne panique pas sous le pressing adverse, même si ses qualités de relance sont moins flagrantes que celles d'un Tapsoba. La Ligue des champions, cette saison, va lui permettre de s'étalonner. Le choc de la 5e journée du championnat contre le leader et rival, le Bayern Munich, ce samedi soir (18:30 en direct sur Sky Sport), également...
De quoi, potentiellement, faire grimper encore sa valeur. Le Bayer, cet été, a repoussé les assauts aux alentours des 30 millions de francs. La cote du joueur équatorien de l'année est supérieure. Son club est resté très discret sur une éventuelle clause de sortie que la rumeur évalue à 70 millions. Son agent fanfaronne sur une future destination "à l'histoire plus riche que celle de Leverkusen". Mais Hincapie, dont le président comme l'entraîneur sont hispanophones, se sent très bien au sein de la Werkself. Qui profitera encore un peu de ses talents.