Ibrahim Maza, le mûr de Berlin
Recruté par Xabi Alonso avant son départ vers Madrid, le jeune Berlinois aux origines algériennes confirme déjà, au cœur du jeu de Leverkusen, les espoirs placés en lui.
Forcément, il allait faire partie du trio. Chaque mois, le site officiel de la Bundesliga organise le vote du jeune talent du moment et, pour novembre, ce sont Yan Diomandé, Bilal El Khannouss et Ibrahim Maza qui sont proposés aux votants, partagés entre le public (40%), les clubs (30%) et un collège d'experts (30%). Le dernier cité est en train de vivre, au Bayer Leverkusen, la confirmation d'un potentiel entrevu au Hertha Berlin, où il jouait jusqu'à cet été. Auteur de 7 buts et 5 passes décisives la saison passée avec le club de la capitale, le Germano-Algérien qui vient de fêter ses 20 ans s'est installé au milieu du terrain des vice-champions d'Allemagne, orphelin de Granit Xhaka et autre Florian Wirtz, partis vers l'Angleterre, avec un aplomb certain.
C'est à la toute fin de l'hiver que la venue au bord du Rhin de Maza, courtisé par plusieurs clubs, s'est concrétisée. Xabi Alonso, l'entraîneur star du Bayer, s'est personnellement impliqué pour le recrutement du natif de Berlin et, a posteriori, on peut dire qu'il a vu juste. Auteur notamment d'un doublé contre Heidenheim, le 8 novembre (6-0), l'ancien joueur des Rheinickendorfer Füchse s'est certes installé comme milieu défensif dans le dispositif de Kasper Hjulmand mais sa formation à des postes plus offensifs – il se décrit d'ailleurs lui-même comme meneur de jeu – lui offre des facilités vers l'avant. « Ibo apprend formidablement bien », a expliqué son entraîneur à l'issue du festival contre le FCH. « Il absorbe très rapidement et travaille très dur. »
Convaincant en Ligue des champions
Si le Bayer s'est incliné, samedi dernier, dans le match au sommet du championnat face à Dortmund (1-2), Maza n'en a pas moins distribué sa première passe décisive dans la compétition et affiche, par ailleurs, un excellent pourcentage de duels gagnés ces dernières semaines, au-dessus de 60%. En novembre, à l'addition des buts et des passes décisives, il est le joueur le plus impactant du club avec Patrik Schick et Edmond Tapsoba. Mais ses aptitudes dépassent déjà largement le cadre national, comme en témoignent ses bonnes prestations en Ligue des champions. La victoire du Bayer à Manchester City (2-0) lui a valu les louanges de Josep Guardiola en personne, qui pèseront sans doute davantage dans la prise de conscience de son potentiel que celles qu'il a continuellement entendues depuis ses débuts à Berlin.
Avec le Hertha, Maza a collectionné les titres de champion d'Allemagne chez les jeunes, évoluant parfois comme relayeur. C'est Pal Dardai qui l'a lancé au plus haut niveau, à 17 ans. Le Hongrois n'a pas hésité à « lui botter le derrière pour qu'il se remue » en lui expliquant : « Tu possèdes un immense don de Dieu, s'il te plaît, sois assidu ! » Un vœu qui semble avoir été entendu. Sous contrat jusqu'en 2030, “Ibo” est décrit par son directeur sportif Simon Rolfes comme « l'un des jeunes joueurs offensifs les plus intéressants du moment, avec une technique remarquable, fort dans le dribble, consistant et capable de lever la tête pour servir ses partenaires à merveille ». Un argumentaire qui a convaincu les dirigeants du Werkself de débourser 10 millions de francs suisses, et qui s'est vérifié en quelques semaines seulement.
Bénéficiaire de l'arrivée de Hjulmand
Le contexte, pourtant, était compliqué : dans les choux d'entrée, Leverkusen a limogé son entraîneur Erik ten Hag au bout de deux journées. Des turbulences qui ont concrètement profité au gamin une fois que le technicien danois eut trouvé son équipe. Aux côtés d'Aleix Garcia, Maza, initialement placé là en raison des diverses blessures au sein de l'effectif, fait valoir son appétence au duel avant de dérouler sa partition. Contre Benfica, il y a un mois (1-0), alors qu'il occupait ce poste pour la première fois, il s'est aussitôt propulsé homme du match. Il ne pourra théoriquement jamais l'être pour la Mannschaft : fils d'une Vietnamienne et d'un médecin algérien, il a opté pour le pays de ce dernier chez les seniors après avoir joué pour l'Allemagne chez les jeunes. La raison ? La concurrence. « Avec des joueurs comme Musiala, Wirtz et d'autres, je me suis dit que comme meneur de jeu, j'aurai plus de chance de disputer la Coupe du monde avec l'Algérie », justifie-t-il.
C'est précisément en lui parlant des deux prodiges du football allemand que Xabi Alonso, début avril, a séduit le jeune homme, l'incitant à suivre leur chemin notamment en matière d'intensité des efforts et de profondeur dans le jeu. Le Basque était déjà en partance mais sa direction assura alors à Maza que même en cas de départ de celui-ci, l'identité de jeu du Bayer resterait la même. Il s'est fondu dedans à la grande satisfaction de Hjulmand, qui apprécie sa soif d'apprendre, sa polyvalence et sa capacité à accélérer le jeu. Son assiduité aussi, qui passe par des heures de rab d'entraînement et une observation attentive du professionnalisme de ses aînés, au premier rang desquels Alejandro Grimaldo, le leader actuel du Bayer.