Stiller-Karazor, le coeur de Stuttgart
Les deux milieux de terrain axiaux du VfB, moins médiatiques que le buteur Deniz Undav ou le portier Alexander Nübel, n'en constituent pas moins une digue essentielle à l'équilibre de leur équipe. Au terme d'un été turbulent, émaillé pour le vice-champion d'Allemagne de nombreux mouvements sur le marché des transferts, ils incarnent la remarquable continuité des performances souabes.
Tout le monde en a convenu : À l'occasion de la première journée de Ligue des champions 2024-2025, le VfB Stuttgart a baladé le Real Madrid, le 17 septembre en Espagne, ne cédant que contre le cours du jeu dans les dix dernières minutes face à l'implacable réalisme des hommes de Carlo Ancelotti (1-3). Bien qu'à l'extérieur, face au club le plus titré du continent, l'entraîneur Sebastian Hoeness n'a renié aucun de ses principes offensifs. Mais si les buteurs viennent en premier à l'esprit, tel Deniz Undav, auteur de l'égalisation, le moteur du jeu souabe se situe au coeur du dispositif, dans la relation étroite qu'entretiennent les deux compères du milieu axial Angelo Stiller et Atakan Karazor.
Ces deux-là sont aussi différents que complémentaires. Karazor, qui honore sa 6e saison sous le maillot du VfB à 27 ans, en est désormais le capitaine. "Un grand honneur", glisse-t-il volontiers. Son jeune partenaire (23 ans) vit autant de grands moments que son aîné : appelé chez les A, il a débuté en équipe nationale à l'occasion de la récente victoire 5-0 contre la Hongrie. Quand il a débarqué dans la capitale régionale en provenance d'Hoffenheim, à l'été 2023, le VfB était dans le dur : quasi relégué, il perdait son capitaine d'alors, Wataru Endo, en partance pour Liverpool. Un mentor dont il allait falloir urgemment combler l'absence. Mais aussitôt, la connexion entre les deux hommes opère.
Lavage, essorage, séchage
D'un côté, le natif d'Essen, d'origine turque, hyperactif sur le terrain au point d'être surnommé “Radio Karazor” par ses coéquipiers, constamment branché sur secteur. De l'autre, le natif de Munich, ancien du Bayern qu'il a rejoint à l'âge de 9 ans, nettement plus calme mais qui reconnaît aisément l'importance de la communication avec son compère. D'un côté, l'assiduité défensive, l'agressivité au duel, la priorité donnée aux tâches défensives par Karazor. De l'autre, la touche technique et la vision du jeu d'un Stiller, davantage porté vers l'avant. L'un écope et encaisse les coups, l'autre les rend. Lavage, essorage, séchage... la paire idéale pour un milieu équilibré et stable, comme en convient leur entraîneur, qui loue une entente dépassant le simple cadre du terrain.
Sebastian Hoeness n'a pas découvert Stiller à son arrivée à Stuttgart : il s'occupait déjà de lui chez les U19 du Bayern et l'a emmené à l'étage au-dessus, en équipe réserve. En 2020, ils célébraient ensemble la montée en 3e division. Désormais international, le jeune Munichois sait ce qu'il doit au neveu d'Uli Hoeness, qui lui accorde en retour un gros crédit. Au milieu des stars du Bayern, et dans une zone à très forte concurrence (Tolisso, Sabitzer, Roca, Goretzka, Kimmich), Stiller n'arrivera pas à s'imposer. Qu'importe : il rebondit un peu plus à l'ouest, en 2021, suivant là encore un certain Sebastian Hoeness. Au Bayern, on le regrette d'autant plus que ses limites sont inconnues et que rien ne lui interdit de s'imposer aussi avec la Mannschaft.
De la mine au conte de fée
Le parcours de Karazor, fils de mineur, est plus caillouteux. Essen, Bochum, la réserve de Dortmund, le Germano-Turc arpente la Ruhr en long et en large. Atterri à Kiel, en 2e division, il bénéficie lui aussi de la bonne relation avec son entraîneur, Tim Walter, qui l'enrôlera ensuite à Stuttgart. Plus que son talent, ordinaire, c'est son opiniâtreté qui fera la différence. Pour lui, "participer à la Ligue des champions est un conte de fée". Mais les deux hommes se sont rejoints en un point : l'un comme l'autre, aujourd'hui, sont des leaders pour leur équipe. Karazor comme aboyeur, Stiller comme injecteur. Quand le VfB souffre, c'est vers eux que leurs coéquipiers se tournent. Et en Bundesliga comme en Ligue des champions, tous peuvent ainsi faire battre le coeur de leurs supporters.